Des héros, de la lumière à l'ombre...

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Cian
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Des héros, de la lumière à l'ombre...

Messagepar Cian » 02 Août 2007, 19:00

... ou, les différents plans de clarté dans votre récit.
(je "sybillinise" à souhait :twisted: )

Plus précisément,
il me paraît utile d'enfoncer une porte ouverte, avec laquelle vous ne serez pas forcément d'accord (et c'est l'intérêt du débat).

Voilà,
lorsque j'ai commencé mon premier roman, j'ai eu tendance à développer chaque personnage, de donner à chacun du premie rôle à l'anonyme figurant ses cinq minutes de gloire, histoire de placer chacun à la lumière des projecteurs.
Ainsi, le tavernier, le marin, le mineur ou qui sais-je d'autre avait un nom, une vague apparence qui le tirait de son simple rôle de silhouette croisée au fil d'une ou plusieurs scènes.
Puis, j'en ai discuté avec ma lectrice qui était gênée par cette surenchère de personnalisation. Elle m'a recommandé, de définir mes héros, voire les personnages secondaires, mais de laisser les autres au niveau du jeu d'ombre. Autrement dit, "nomme-le tavernier, marin, mineur" et rien de plus. Ca allègerait le récit et permettrait de mieux mettre en évidence ceux qui comptent vraiment.
Je me suis laissé convaincre et je n'ai pas eu à m'en plaindre depuis. Il me semble que le récit y a gagné en fluidité et en clarté.

Mais les avis ne sont sûrement pas unanimes, après tout il peut être plaisant de "croquer" un personnage d'arrière-plan.


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Napalm Dave
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Messagepar Napalm Dave » 02 Août 2007, 19:22

Franchement, mon propre roman regorge de personnages secondaires et je leur ai donné à tous un nom pour ceux qui interagissent en dialogue avec mes personnages principaux au moins. Ca ne gâche pas trop de papier et franchement ça aide le lecteur à se plonger dans un monde, pareil pour mes personnages de nouvelles. le tout est de rendre les descriptions fluides: par exemple une ou deux phrases pour commencer puis un ou deux détails livrés un peu plus tard (le héros se rend compte à quel point l'aubergiste a le regard mauvais, il remarque soudain le tatouage derrière l'épaule de la serveuse avec laquelle il parlait dix minutes plus tôt).
Même dans un combat où personne ne parle, je laisse des descriptions indentifiant les personnages ou créatures affrontée: ça a tellement plus de saveur. De plus, seconds rôles peuvent devenir nouveaux éléments de l'intrigue.
Et d'ailleurs trop d'inégalité de descriptions entre les personnages secondaires entraîne un syndrôme fâcheux: celui du personnage important dans l'intrigue mais amené trop vite et mal. Ben oui, si vous lui consacrez cinq lignes de descriptions, il se détachera forcément du reste du décor.

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Messagepar Neryelle » 03 Août 2007, 00:43

Ben perso je vois pas trop le problème à ce qu'un personnage important se détache rapidement. Je préfère ça que la description pendant 2 pages d'un personnage qu'on ne revoit plus (enfin, si c'est systématique. sinon si ça a un but genre introduire un autre personnage ou avoir un effet comique ou je ne sais quoi ça peut être sympa).

Nommer tous les personnages mineurs je vois effectivement pas l'intérêt, au contraire ça risque de générer de la confusion plus qu'autre chose (j'ai déjà du mal à retenir les noms d'un nombre réduit de persos alor ssi en plus y'a des noms de persos complètement annexes qui se mélangent)... Après c'et pareil il peut y avoir des exceptions :o

Par contre les décrire un peu ça peut être sympa si c'est bien mené...

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Messagepar GabrielleTrompeLaMort » 03 Août 2007, 09:31

Les personnages très secondaires (appelons les tertiaires !) n'ont pas forcément besoin de noms, ou d'être mis en lumière, mais il peut être agréable pour le lecteur de retrouver un personnage familier dans un environnement familier d'un passage à un autre (un vieil ivrogne qui aborde toujours le héros quand il passe dans telle auberge, ou telle marchande de poisson dont l'étal sent toujours le pourri) et donner quelques détails à chaque fois, sans plus, pour les rendre vivants sans qu'ils prennent la place du héros. ;)
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Messagepar Epistolier » 03 Août 2007, 09:49

Cian, je cois qu'il faut distinguer la fiche perso, et son utilisation dans le roman. As-tu déjà écouté une saga MP3 du nom de Naheulbeuk ? Ce n'est pas parodique pour rien : Lors de l'arrivée d'un nouveau personnage, sa fiche est lu avec plus ou moins d'entrain (nom, catégorie, lvl, pouvoirs...).

Il est certain que cela est contreproductif.

Avant d'appeler Roger le Tavervier par son nom, il ne faut pas que ça soit la première que le héros rentre dans la taverne. Trouve toujours des petites subtilités pour nous donner des infos si tu en as envie, mais n'essaye pas d'utiliser toutes tes notes dans ton roman.

Si Roger trompe Moumoune tous les jeudis soir, tu peux l'écrire dans tes notes préparatoires, mais nous sommes pas obligés de le savoir. Si dans l'intrigue il y a un jeudi et que nous croisons Roger dans la rue, pas la peine de le suivre non plus. Les détails non-dits sont toujours beaucoup plus forts que les les descriptions incessantes.

Le roman Dune, de Frank Herbert est un bon exemple : dès les premières pages, le mot balisette apparait. Mais pour avoir une description précise de ce qu'est une balisette et de son utilisation, il faudra le découvrir par soi-même tout au long du récit, où ces informations sont plus ou moins en filigranes.

Exemple de science-fiction, mais mon dernier roman de fantasy lu en est un aussi : Le Chevalier de Gene Wolfe. Nous avons même un procédé intéressant : des allusions incessantes à des scènes ou personnages importants mais que nous rencontrons que plus tard. Au début c'est déconcertant, mais cela donne une véritable richesse au roman. Ici, explicitement, nous en parlerons plus tard : Au lecteur de ronger son frein :lol: :lol: :lol:
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Napalm Dave
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Messagepar Napalm Dave » 03 Août 2007, 10:31

Oui voilà, je crois qu'Epistolier a précisé ma pensée, je prévois une description et un nom pour mes seconds rôles mais pas forcément de tout livrer de but en blanc au lecteur (quelque fois je ne mets pas de nom du tout dans le récit). Simplement, je les décris toujours, même si c'est juste avec un mot ou ou un groupe de mot (exemple: "un garçon de ferme mal rasé et souffreteux vint chercher le sac besace d'Amaury").
C'est que je suis toujours embêté par les personnages secondaires pas décrits du tout, j'ai une impression de fadeur qui se dégage de ma lecture. Et puis une description n'a pas besoin d'être nécessairement détaillée: un ou deux épithètes par exemple et plus tard, dans le dialogue, vous pouvez mettre par exemple:"Bien sûr messire, tout ce que vous voulez! dit le garçon d'une voix cassée; son accent napolitain était particulièrement marqué." En quelques mots, nous savons que l'on a affaire à un gringalet, négligé et venu du Royaume de Naples (ce n'est qu'un exemple au ras des pâquerettes, hein? :lol: ).

Donc je dirai que je ne suis pas très d'accord avec la lectrice de Cian, sauf si elle pointait des problèmes de descriptions trop mécaniques (style trois phrases de descriptions par perso et le même type de vocabulaire et de construction, je ne me moque pas, je le faisais avant). Il faut bien sûr éviter les descriptions trop rolistiques, néanmoins, une histoire où, par exemple, le héros traverse dix auberges qui se ressemblent toutes et où chaque aubergiste est le clone de celui du dernier relais, c'est un peu agaçant.
Dernière édition par Napalm Dave le 07 Août 2007, 13:13, édité 3 fois.

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Messagepar Beorn » 03 Août 2007, 10:33

Chacun ses méthodes.

Pour moi, un personnage qu'on ne fait que croiser, on n'a pas à connaître son nom. ça alourdit, et puis son nom, on s'en fiche. Peut-être que par la suite il prendra de l'importance, et ce sera une surprise pour le lecteur

Par contre, je trouve ça bien de le décrire en une seule ligne, par une particularité physique "un grand type" ou "une fille aux cheveux défaits".

Comme ça, on peut les faire agir et parler entre eux après :
-paraît qu'on trouve des fraises à 3€90 le kilo ? dit le grand type.
-Ouais, mais pleine de sable et pourries au fond de la barquette, répondit la fille aux cheveux défaits.

Comme dans la vie en fait : on croise des gens, on oublie leur nom, et demain peut-être qu'on passera une soirée avec eux, ou, qui sait, qu'on leur fera des gosses. :lol:

Peut-être qu'au chapitre huit, on apprendra que la fille assassinée au troisième sur le palier, c'était la fille aux cheveux défaits du supermarché, celle qui trouvait du sable dans ses fraises !

EDIT : Ah zut, le dragon m'est passé devant !
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Messagepar Beorn » 03 Août 2007, 10:41

Epistolier a écrit :Le roman Dune, de Frank Herbert est un bon exemple : dès les premières pages, le mot balisette apparait. Mais pour avoir une description précise de ce qu'est une balisette et de son utilisation, il faudra le découvrir par soi-même tout au long du récit, où ces informations sont plus ou moins en filigranes.


Là, je ne sais pas si on est encore dans le sujet, mais bon, peu importe, je trouve ça très important et je suis absolument d'accord.
Le lecteur se trouve devant un objet ou un personnage qu'il ne connaît pas, et tout le monde dnas le roman en parle comme si c'était une évidence. ça, ça me plaît.

Alors que l'auteur qui va nous dire "la balisette était un instrument de musique à neuf cordes..." celui-là, il me fait fuir.
Parce que le personnage, lui, il sait très bien ce que c'est qu'une balisette, et il ne pensera pas une seconde à la décrire (pour quoi? pour quoi ?), il pensera à la beauté de la musique ou à celle du musicien. Toute autre considération serait parasite, étrangère au récit.

Bien sûr, il faut que l'auteur se débrouille pour qu'on finisse par comprendre, mais en attendant, la balisette aura ajouté un mystère, instauré une atmosphère...
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Messagepar Epistolier » 03 Août 2007, 10:52

J'ai l'impression que c'est exactement le sujet. Le sujet n'est pas de savoir si tous les personnages doivent avoir un nom (ils en ont un). Le sujet est de savoir s'il faut connaitre le nom du personnage (ainsi que son sexe, pilosité, antécédents médicaux, numéro de sécu, dernière fiche de paie).

Mais Beorn, un narrateur n'est pas forcément un personnage. Il y a des narrateurs impersonnels, qui n'intéragissent pas du tout avec les personnage du récit. Je crois surtout que la raison est que le sujet d'un roman n'est pas forcément de nous faire découvrir un univers particulier. Nous devons simplement connaitre l'univers du récit...
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Messagepar Beorn » 03 Août 2007, 10:58

Epistolier a écrit :Mais Beorn, un narrateur n'est pas forcément un personnage. Il y a des narrateurs impersonnels, qui n'intéragissent pas du tout avec les personnage du récit.


Oui, techniquement, si tu travailles à la troisième personne (et c'est le cas dans Dune), tu peux dire ce que tu veux sur la balisette, seulement, tu risques de saccager ta scène.

Bon, évidemment, je caricature, ça peut aussi être très bien fait et bien passer. Mais c'est souvent un défaut que d'essayer de tout décrire au risque de ruiner l'intensité dramatique du moment.
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Messagepar Claire Panier-Alix » 03 Août 2007, 11:36

c'est ce que je voulais dire en parlant d'imbriquer...

mettre en scène ta description, la rendre utile car imbriquée dans l'action. tu veux décrire un objet, dire à quoi il sert ? ton personnage n'a qu'à l'utiliser.
Plus ça va, plus je privilégie ce genre d'écriture. Je crois que le lecteur est capable de combler les lacunes sans s'en rendre compte, parce que tu as induit les informations et qu'il va les déduire. Voire même les inventer (un paysage, par exemple. En quelques mots, tu évoques ce qu'ils ont de particulier, de frappant, un élément spectaculaire. Sinon, juste dire une forêt de vieux chênes, ou une chaîne de montagnes barrant l'horizon de ses crêtes enneigées. ça suffit, l'imaginaire du lecteur fait le reste.

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Messagepar Epistolier » 03 Août 2007, 11:39

C'est même plus que ne pas saccager la scène que d'avoir choisi de ne pas décrire la balisette. C'est tout Dune qui est comme cela. L'importance de l'eau sur la planète nous est délivrée principalement par anecdotes. C'est cette vision en filigranes qui nous donne Dune. On y gagne bien plus qu'une intensité dramatique du moment, c'est toute une ambiance particulière qui est crée.

À propos d'ambiance, d'un film d'horreur, ce n'est pas le méchant monstre qui fait peur. D'ailleurs ce n'est que récemment que le monstre est vraiment montré. Et le plus souvent il ne fait pas peur. Si on voit une scène de carnage, c'est du gore, mais ça ne fait pas vriament peur. Le sentiment de peur, c'est de l'éclairage, une caméra, du son, une attitude. Dans le roman, ça doit être pareil, et pas que pour les scènes fortes émotionnellement. La suggestion est plus forte car elle rend le lecteur complice. En luii expliquant tout, on le prend par la main comme un enfant, c'est différent.
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Messagepar eLiz » 05 Août 2007, 23:23

Moi je dirai : si tu as du style, alors tu peux tout te permettre, Cian. :toothy2:
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Messagepar Oliv » 06 Août 2007, 12:55

Une fois de plus, je trouve qu'Elise frappe juste, et qu'avec sa phrase laconique elle remet plus ou moins en cause la majorité des discussions qui ont lieu ici: en effet, toutes les règles, tout "ce qu'il faut faire pour écrire un bon roman", tout cela reste très théorique, très scolaire, et ne tient plus la route dès lors que l'on s'adresse non plus à quelqu'un qui tâtonne, qui en est encore à rechercher son style, mais qui est entré dans la catégorie de ceux qui "savent écrire" et qui n'a donc plus besoin de s'interroger sur le bien-fondé de ce qu'il fait à chaque fois qu'il aligne trois mots.

Enfin bon, ce cas de figure ne doit pas concerner grand monde sur ce forum, ceci dit.
À l'Affreux Oliv (Mars 2005-Février 2010), la Patrie pas reconnaissante.

Si vous me cherchez, je ne suis plus ici.

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Messagepar Beorn » 06 Août 2007, 14:10

Ouais, Oliv, Eliz, quand on est doué, on écrit bien, c'est sûr.
Mais passé ce genre de constat, ce n'est pas inutile de voir comment font les autres, pourquoi et ce qu'ils en pensent.

On peut penser que la création est essentiellement du domaine de l'intime et qu'elle ne sort que de soi-même, ou on peut penser qu'elle est le fruit de tous les mélanges d'idées et d'infos qui nous passent sous les yeux.
On peut aussi penser que ce n'est pas sur ce forum qu'on trouvera les meilleures idées, mais dans les oeuvres des maîtres, ou dans la rue, ou dans les yeux d'Emilie (pour ceux qui aiment Joe Dassin).

La vérité, c'est que c'est diablement compliqué, en tout cas, et que c'est plutôt agréable d'en discuter. Et que, même, pourquoi pas, des fois ça peut nous aider, même si ça ne va pas nous écrire le roman à notre place.
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Messagepar Epistolier » 06 Août 2007, 14:20

Et voilà !

Nous tombons dans le mythe français de l'auteur doué par simple imposition des mains.

Ce n'est pas parce qu'un écrivain écrit bien et qu'il donne des cours dans des ateliers d'écriture qu'il est sûr de lui et peut sortir des romans en quelques semaines.

L'auteur français doit sortir de nulle part, être doué et autodidacte. S'il a suivi des cours d'écriture, il sera conformiste, et oh que c'est mal vu. "Je suis un écrivain, je ne vais pas m'abasser à modifier mon style pour répondre aux normes littéraires du moment !"

Le cas de figure de l'écrivain qui ne s'interroge plus sur sa façon d'écrire est très rare.
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Messagepar Cian » 06 Août 2007, 18:57

L'approche du "créateur" français est assez éloignée des critères anglo-saxons d'efficacité et de professionnalisme, que ce soit au cinéma ou en fantasy.
Il y a de bons "faiseurs" et des tâcherons dans ces deux domaines, mais il est assez évident que pour un auteur des States écrire est un travail à part entière, qu'il accomplit comme d'autres sont journalistes ou n'importe quoi d'autre. Ca donne des Goodkind à la chaîne et quelques pros doués.
En France, l'écrivain, le cinéaste sont des artistes, des créateurs, bref ils sont investis de la muse adéquate. Ce sont des auteurs.
C'est du moins ainsi qu'ils se voient, pour notre plus grand malheur.
Mais là, on s'éloigne du sujet initial.


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Messagepar eLiz » 06 Août 2007, 19:26

Qu'on ne se méprenne pas : je méprise particulièrement ceux qui s'autoproclament artistes car ils croient posséder la lumière divine, le souffle magique, la malédiction infernale sur eux, etc etc, un point c'est tout. La notion d'auteur et d'artiste de nos jours me semble particulièrement bafouée par cet espèce d'euphorie collective selon laquelle tout le monde il peut être doué, tout le monde il peut produire des chefs d'oeuvre, car tout se vaut et je peux bien dire que Marc Lévy c'est extraordinaire et que les vingt siècles de littérature qui ont précédé ne sont rien que de la crotte car c'est mon goût qui me le dit.

Ceci étant dit, je précise ma pensée : à mon humble avis il faut s'attacher au style bien avant de se poser d'autres questions. Car du style découlera quasiment toutes les réponses... S'efforcer d'être précis quant à ce qu'on souhaite vraiment exprimer, peser ses mots, les faire rouler dans le bon sens, jauger ce qui peut être nécessaire et ce qui ne l'est pas - pas par rapport à des critères ou à des canons préétablis, mais par rapport à ce qu'on veut, soi-même, par rapport à son histoire - être exigeant et rude avec soi-même, se demander ce à quoi l'on tient vraiment, quand on écrit, si ce paragraphe que l'on vient de rédiger pourrait être supprimé et oublié le lendemain sans ressentir en soi une sorte de désespoir froid et aigre d'être passé à côté de quelque chose qui nous tenait pourtant à coeur, même si toutes les règles de la bienséance vont à son encontre... Enfin, voilà, pour écrire, il faut d'abord savoir ce que l'on veut écrire, bien avant de se demander si ça fait bien ou pas, si c'est lourd ou pas, si c'est efficace ou si c'est nuisible. Oui, évidemment, c'est dur, évidemment, on veut plaire, on ne veut rien gâcher ; mais moi, si on me parle longuement d'un pêcheur qui ne durera qu'un chapire, qu'on apprend de lui toute sa vie, subitement, et que sa vie exprime des choses qui vont au-delà de l'intrigue, de l'histoire, de la volonté de faire se dérouler une action particulière en vue d'une fin... Pourquoi pas ! Pourquoi se priver si on a un tas de trucs à exprimer ? Je pense subitement à Dumas, qui n'hésite pas à donner beaucoup de couleur et de densité à ses personnages secondaires, à leur dédier des chapitres entiers... C'est délicieux, même si l'intrigue des mousquetaires est palpitante et si on souhaite ne suivre qu'eux, au final, on savoure ces petites tranches de vie qui enrichissent, accentuent, poétisent tout un monde et lui donnent une vraie saveur. Et pourtant, narrativement parlant, ces longues digressions n'apportent rien de particulier.

Alors voilà, ce que voulait dire ma phrase : écris ce qu'il te plaît ! Il faudra ensuite avoir l'honnêteté de jeter le superflu et de garder ce que tu as vraiment envie d'exprimer. Mais ça, il n'y a que toi qui peut - et qui doit - le savoir, sincèrement, à mon avis.
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Messagepar Beorn » 07 Août 2007, 09:13

eLiz, ta réponse est écrite avec beaucoup de talent, ce qui plaide en faveur de ta thèse : soignez le style, c'est le plus important. Et je pense qu'aucun auteur ayant réfléchi à la question, apprenti ou non, ne pourra te contredire.

Mais bon, d'abord le style n'est pas tout. La construction du récit, les thèmes et les personnages qui font battre le coeur du lecteur, les surprises qui lui font ouvrir grand la bouche et se dire "quoi, c'était donc lui? Pas possible !", autrement dit l'habileté du scenario, c'est un élément distinct du style.
Je crois qu'Alexandre Dumas n'aurait pas dit le contraire. :wink:

Ensuite, le style, comme cela a été dit, ce n'est pas une magie obscure, uniquement faite de génie et de solitude (même si c'est en partie cela) c'est aussi la somme des petits trucs d'écriture de chaque écrivain. Aucun ne constitue une "recette", certains ne fonctionneront que pour Paul et pas pour Jacques...

Il n'empêche, c'est une création permanente : de l'imagination dans chaque phrase, une marmite pleine de tout ce qu'on peut trouver dans sa petite tête. Ce n'est pas juste "voix passive" ou "voix active", c'est aussi penser au détail d'un visage, à une comparaison, à une métaphore, c'est faire un lien amusant entre deux idées, c'est jouer avec les mots...

Pourquoi se priver d'essayer les trucs des autres pour enrichir son style ? Pourquoi se priver d'essayer de définir ce qui nous convient le mieux ? Pourquoi ne pas jeter dans la marmite des ingrédients qu'on n'avait encore jamais goûtés ?

Moi, je tâtonne. Je n'ai pas de règle et personne ne pourra m'en imposer. A chaque texte, j'essaye, je papillonne, j'invente et parfois je reviens en arrière. Parfois, j'en suis content, parfois non.
Mais ça me fait progresser : de cela, au moins, je suis certain.
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Messagepar Epistolier » 07 Août 2007, 12:15

Cian a écrit :Ca donne des Goodkind à la chaîne et quelques pros doués.
En France, l'écrivain, le cinéaste sont des artistes, des créateurs, bref ils sont investis de la muse adéquate. Ce sont des auteurs.
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Mais nous avons aussi avec notre méthode des Goodkind à la chaine !

Nous avons autant de 'mauvais' qu'aux States.

Malheureusement...
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