Maison d’édition avec jeux sur caractères et mise en page (désolée de répondre si tardivement, je n’étais pas passée par ici depuis quelque temps) : ce sont des bouquins plutôt carrés (pas rectangle), des contes, jeunesse (Syros ? Je ne suis pas sûre), depuis j’en ai vu d’autres (autre maison, autre collection, autre genre) mais sans doute mes cheveux n’arrivent pas à colmater tous les trous de ma passoire : je me souviens m’être dit « ah, tiens, il faut que je note ces références », mais j’ai plus les titres en tête. Si tu as l’occaze d’aller fouiller dans une librairie ou une bibliothèque jeunesse, tu en trouvera sûrement.
Pour L’histoire sans fin, c’est une édition allemande (Thienemann), je ne sais pas si en français ça s’est fait en couleurs.
Maintenant, j’en viens au sujet de mon escale ici, justement.
C’est le Mal-du-roman, ça rampe dans les pages, ça se glisse entre les mots, ça bave sur les numéros de pages, ça fait valdinguer des paragraphes d’un coup de queue, c’est…
…
la rétention d’information
(prononcez avec un accent à faire se dresser le suaire d’un fantôme, SVP.)
C’est nul, la rétention d’information, ça prend le lecteur pour une poire, ça se fiche de sa figure, « moi j’ai dans la poche un document qui peut changer le monde, avec une grosse révélation dedans, et d’ailleurs j’en ai parlé à tout le monde sauf au lecteur, héhéhé, j’ai une longueur d’avance sur cet imbécile de lecteur, je me le balade comme un coyote attaché à la queue de mon cheval ».
Bon, quelques lignes, ça peut aller, on peut pas tout balancer au cerveau lisant comme ça d’un coup d’un seul, faut le temps des mots. Mais pas trop beaucoup plus.
Voici pour illustrer mon propos l’exemple honteux qui le déclencha
(les noms des personnages ont été modifiés afin de préserver les personnages de toute poursuite éhontée de la part des lecteurs mécontents : en effet, ils sont en pleine pénitence, et ce serait bien vilain de vouloir accroître leur peine qui est déjà fort grande) :
Nous sommes page 43, je vous le fais en version digeste :
Il se retourna. Cunégonde, un sac à la main, le regardait en souriant. Il pensa : mais comment a-t-elle pu survivre à l’odieuse tueuse lancée à ses trousses ? [
Biiiiip : la réponse se trouve page 124]
( … )
Alors il sut ce qu’il y avait dans le sac, et n’osa l’ouvrir. [réponse 14 lignes plus bas : là ça va]
— A ce soir, fit Cunégonde.
Et elle disparut dans la foule.
Une fois seul, Firmin osa entrouvrir le sac. ( … ) son excitation était à son comble : il s’agissait d’une lettre du professeur Tagada adressée à son gendre. Une pièce inestimable, un apport sans précédent pour les scientifiques ! Bien plus surprenant et de bien plus de poids qu’en aurait eu la tête tranchée de la tueuse qu’il s’attendait à découvrir. Qu’était-elle devenue, d’ailleurs, celle-là ? Firmin préféra ne pas y penser [
Biiiiip : ha mais c’est que ça insiste en plus ! La réponse est toujours page 124]
Alors qu’il marchait d’un pas vif dans le couloir pour tout aller raconter à la Reine, son bonheur fut interrompu par une pensée fâcheuse : d’où Cunégonde tenait-elle donc ces lettres ? [
Biiiiiiip ! Réponse page 129]
Au même moment, Cunégonde retrouvait son ami Marco sur un banc du parc.
— J’espère que les lettres ne le laisseront pas indifférent, dit-elle.
— Indifférent ? Tu rigoles ! Personne ne peut se permettre d’être indifférent aux lettres de Tagada ! [
Biiiiip ! le lecteur ne sait absolument pas de quoi il s’agit, il n’a jamais entendu parler du professeur Tagada, il commence à se demander sérieusement si l’imprimeur a pas inversé des pages et vérifie les numéros. Il se dit que l’info arrive sans doute dans quelques lignes. Gourmand, avide, même, il reprend la lecture]
— Au fait, comment les as-tu obtenues, tu ne m’as pas dit ? [Ah tiens, non, on zappe Tagada, on revient sur le « comment ». Bon, se dit le lecteur, tant pis, je vais me contenter d’un « comment » pour l’instant, alors…]
Cunégonde fit la moue :
— J’ai tout de même un peu peur pour ce soir. Il viendra sûrement accompagné de ses sbires. [
Biiiip ! Biiiiip ! Biiiiiiiiiiiiip ! Mais
Biiiiiiiiiiiiiiiipeuuuuuuuu ! Pourquoi qu’elle répond pas cette cruchaude ? Pourquoi qu’elle esquive d’abord ? Page 129, on voit très bien qu’il n’y a pas de honte a avoir…]
Bouh-hou-houuuuuuuuuuu…
Donnez-moi un fouet j’ai le dos qui gratte ! Pénitence ! Pénitence ! Pénitence !
Vous avez deviné… c’est un texte que c’est mon neurone à moi qui l’a pondu…