Messagepar Max Katarn » 29 Déc 2006, 11:11
Histoire de recentrer le topic, je me permets d'instruire les jeunes auteurs (et les moins jeunes) sur le principe de fossé narratif, car il me semble utile pour toute personne qui se lance dans l'écriture d'un roman (ou d'un cycle de roman) d'avoir une petite idée de sa signification.
Le fossé narratif, c'est ce qui sépare un protagoniste d'un objectif. Cet objectif peut être lié à l'intrigue principale (le coeur de votre histoire) ou à une des intrigues secondaires.
Exemple avec une histoire d'amour. En tant qu'auteur débutant, je préfère éviter de faire d'une amourette mon intrigue principale. Cela dit, et pour "justifier" cet "intrigue amoureuse", il est habile (un scénariste dirait que c'est obligatoire) de lier l'enjeu de l'histoire d'amour aux objectifs de l'intrigue principale.
Allez, un petit exemple Fantasy avec... le Seigneur des Anneaux. Les principes que j'explique ne viennent pas de moi, mais j'ai choisi et analysé personnellement cette oeuvre pour illustrer mon propos.
Aragorn doit combattre Sauron de face (devant la porte du Mordor) pour combattre ses démons intérieurs (appartient à l'Intrigue Secondaire "Le fardeau de son ancêtre Isildur").
Mais il doit également combattre Sauron pour créer une diversion pour Frodon, et sauver la Terre du Milieu (Intrigue Principale).
Hors contexte, mais je le précise quand même : en prenant ainsi la tête, Aragorn annonce le fameux "Retour du Roi" et du sang de Numenor au pouvoir... C'est l'intrigue principale du 3ème volet mais c'est une intrigue secondaire dans l'ensemble du Cycle.
L'Enjeu créé par son "histoire d'amour" avec Arwen, c'est que s'il ne sauve pas la Terre du Milieu, sa bien-aimée mourra. L'enjeu de l'Intrigue Principale est donc fortement agrandi et peut amener une fin très négative : la fin de la Terre du Milieu, la mort d'Aragorn (ou la fuite après la défaite, si c'était un lâche) et la mort d'Arwen.
Donc forcément, Aragorn ne fuira surement pas et risquera même jusqu'à sa vie, non pas uniquement pour sauver la Terre du Milieu et son ami Frodon, mais aussi celle qu'il aime.
A l'inverse, certaines histoires crééent une histoire d'amour dont l'enjeu va à l'encontre de l'intrigue principale, et où le protagoniste devra faire un choix ou se surpasser pour obtenir à la fois la réalisation de son objectif principal ET l'amour.
Donc pour résumer, dans un cas, on agrandit le fossé narratif. Si il échoue, le personnage n'aura plus qu'à se pendre tellement il aura merdé dans la réalisation de ses désirs.
Dans l'autre, on créé EN PLUS un fossé plus petit ou équivalent, ce qui revient au même. Soit le protagoniste réussit à passer les deux fossés, soit il sacrifie un de ces objectifs, ce qui peut l'accabler sur le plan moral dans la réussite de l'autre objectif.
Dans une histoire, la vie n'est jamais simple, et tout naît dans le conflit (moral ou physique...). Cela procure une expérience intense au lecteur (ou au spectateur suivant le médium, comme certains adorent penser que leurs oeuvres seront adaptées).
Pensez-y, si votre histoire n'a pas d'enjeu, que les fossés narratifs sont inexistants où que votre protagoniste principal (le personnage clé, l'acteur de l'histoire. Celui qui progresse pendant le récit et fait avancer votre histoire par la même occasion) les comble aisément, peu importe l'univers, lieux ou races que vous aurez créés : votre histoire ne méritera pas d'être racontée.
NB : En tant que bêta-lecteur, j'ai récemment remarqué que même lorsque l'auteur a inconsciemment créés de "beaux" fossés narratifs, le style est souvent plus fluide, les dialogue sonnent plus juste, enfin bref, la scène est plus convaincante.
Serait-il plus facile d'écrire une scène bien conçue ?