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Publié : 06 Fév 2008, 12:38
par orque fou
Une phrase de proust, c'est un chef d'oeuvre.

Un paragraphe de prout, c'est à encadrer.

Une page de proust, c'est superbe

Un chapitre de Proust, c'est de l'émotion forte.

Un livre de proust, c'est chiant

7 Livres de proust, c'est pire que Aubenque.

Un Khâgneux repenti...

Publié : 06 Fév 2008, 19:16
par Nynaeve
:shock: Ah oui ! C'est vrai que Proust était au programme de la khâgne l'an dernier ! :shock:


Toutes mes condoléances... :pray:


Désolée, c'était plus fort que moi. J'étais tellement heureuse d'échapper à la khâgne et à Proust !!!

Publié : 06 Fév 2008, 19:25
par ereneril
orque fou a écrit :Un paragraphe de prout, c'est à encadrer.



Désolé mais je ne pouvais pas ne pas le signaler... whistle

Publié : 06 Fév 2008, 20:23
par eLiz
Beorn a écrit :Eh bien, pour certains, peut-être, pour moi non, ça ne me suffit pas. Moi j'ai besoin de ces choses si méprisées que sont l'émotion et l'identification. La littérature, art froid, ce n'est pas pour moi.


Là dessus, je ne suis pas d'accord ; enfin, j'extrapole sûrement sur ce que tu penses, mais Proust n'est pas selon moi un auteur "froid".

Je trouve un peu injuste qu'on le considère comme un auteur purement nombriliste se préoccupant plus de son petit délire que de son lecteur. Méprise ! Déjà on le sait depuis bien longtemps : parler de soi, c'est la meilleure façon d'atteindre l'autre au final. Ce n'est pas parce qu'on dit "je" qu'on est pathétique et compagnie, c'est seulement quand on dit "je" qu'il peut y avoir un vrai "tu". Se livrer soi-même est un acte généreux, particulièrement en littérature, il est dangereux, ambigu, et souvent mal compris ; il est pas narcissique, surtout quand il se fait avec honnêteté et sincérité. Après il faut avoir soi-même, en tant que lecteur, l'envie de découvrir et de comprendre, plutôt que celle de consommer de la manière la plus reposante, confortable, et digeste possible, ce qui nous est proposé. Se mettre autant en danger que l'auteur au final pour répondre à son acte qui lui-même était périlleux. (Enfin, je ne vais pas m'étendre plus en avant, les discours anti "je" me sont pénibles, et puis j'arrête pas de parler de ça en ce moment enfin - faut lire mon blog à la limite.)

Par ailleurs, ne pas confondre auteur et héros - règle de base. On reste dans la fiction.

Sinon il m'est difficile de penser à La Recherche en termes d'intrigue et de roman. J'ai du mal à envisager les livres comme des romans. Je ne saurais pas comment définir le tout. J'ai peut-être tort. Et puis par ailleurs je n'ai pas terminé le tout donc j'en reparlerai sûrement plus tard.

Il me semble quand même que ce n'est pas tant ce qui est décrit qui compte, mais le regard à travers on regarde ce qui passe. Il y a des passages vraiment très émouvants dans l'oeuvre, qui m'ont bouleversée, autrement que dans d'autres oeuvres plus noires, plus douloureuses peut-être ; mais l'émotion était réelle, elle était très profonde, intense, sans perdre de cette délicatesse pudique, et cette sincérité qui me touchent beaucoup. Justement, je pense que l'émotion, le sentiment, la perception, les sensations priment peut-être sur l'intrigue, et c'est sûrement difficile à appréhender pour n'importe quel lecteur qui ne se "sent" pas d'entrer vraiment, pour de bon, dans le texte. Il y a quelque chose de très sensuel par delà les très nombreuses références très érudites, par delà les tournures parfois très complexes. On plonge aussi, de manière moins frontale et perturbante chez que Faulkner, mais de manière tout aussi vertigineuse finalement, dans l'intériorité d'un être. Et je ne pense pas qu'on puisse savourer vraiment, pour de bon, Proust, en se contentant d'une phrase ou d'un paragraphe de temps à autre... Ce serait comme se repaître d'un grain de riz selon moi.

Quant aux Khâgneux, loin de moi de décrier l'éducation nationale (mais presque), mais je dois dire que l'instruction ne joue pas souvent un rôle favorable dans l'appréciation des oeuvres finalement - ce qui est dommage.

Et moi j'aime Proust alors : prout ! :toothy2:

Publié : 06 Fév 2008, 20:50
par Helia
Je suis d'accord sur un point avec toi Eliz, et je trouve que tu as très bien formulé les choses: En ce qui concerne le "je".

Tout le monde parle de soi à travers ses écrits, et tout le monde est égoïste à sa manière. L'assumer et tenter d'y trouver quelque chose qui, vraiment, pourraît interesser autrui, plutôt que de ce cacher derrière une morale, je ne trouve pas ça déplorable.

Je n'ai pas lu tout Proust, ma lecture remonte à déjà longtemps, et ce n'est pas mon auteur fétiche; mais il fait partie de ceux dont j'apprécie les textes.

Pour ce qui est de l'intrigue, encore une fois, je déploie mon avis: Qu'est-ce qu'une intrigue? Est-ce un noeud qui vous fera vibrer dans un bref instant de suspens? Ne peut-elle pas se trouver là où il y a une grande question métaphysique, et faire ainsi vibrer le lecteur pendant bien plus longtemps? Tous ne seront pas emballés, peut-être, mais il s'agit d'une forme d'intrigue.

Publié : 06 Fév 2008, 21:55
par Beorn
De l'émotion chez Proust ?
Il et possible que je sois passé à côté. Moi je n'en ai pas ressenti (enfin, je n'ai pas tout lu non plus et comme Helia, c'était il y a longtemps).

Quant au "je" qui peut devenir universel, oui, je suis d'accord. Ce n'est pas ça, que je reprocherais à Proust : la madeleine parle à tout le monde...

Mais précidément, c'est ça que je retiens de Proust : des idées, surtout des idées, des concepts comme la madeleine, ou une de ses phrases sur l'amour de Swann pour Odette (des petits amour qui se succèdent et qui semble former un amour continu ou quelque chose comme ça). Des idées, mais pas d'émotion.

Publié : 07 Fév 2008, 12:13
par orque fou
Nynaeve a écrit ::shock: Ah oui ! C'est vrai que Proust était au programme de la khâgne l'an dernier ! :shock:


Toutes mes condoléances... :pray:


Désolée, c'était plus fort que moi. J'étais tellement heureuse d'échapper à la khâgne et à Proust !!!


ouais, on avait albertine disparue, et j'ai poussé le vice jusqu'à lire du côté de chez swann ! et une camarade les a tous lus !!!

@ereneril, gnagnagna.

Publié : 07 Fév 2008, 13:58
par eLiz
D'accord avec toi Helia : il est vrai qu'on peut trouver une forme d'intrigue dans cette forme de déploiement du sentiment.

Beorn a écrit :Mais précidément, c'est ça que je retiens de Proust : des idées, surtout des idées, des concepts comme la madeleine, ou une de ses phrases sur l'amour de Swann pour Odette (des petits amour qui se succèdent et qui semble former un amour continu ou quelque chose comme ça). Des idées, mais pas d'émotion.


C'est assez surprenant comme constatation, car Proust est connu pour être l'auteur du sentiment, pour être celui qui est allé le plus loin en ce domaine - du moins, il me semble.

En fait, je crois que le problème récurrent, avec la question de l'émotion et du sentiment, c'est qu'on ne le détache jamais vraiment d'un "événement" ou d'un fait. Pire : souvent on réduit la simple expression du sentiment à la seule réaction par rapport à un fait donné. Plutôt que de s'interroger sur la qualité, la profondeur, et la complexité du sentiment en lui-même, on se demandera quelle en est la cause avant tout ; et d'ailleurs, soi-disant, connaître la cause permettrait de comprendre l'intégralité du sentiment et mieux le dominer.

Or c'est vraiment simpliste et dommage : on est pas triste parce qu'il se passe ceci ou cela. On est pas heureux simplement parce qu'il nous est arrivé un truc chouette. Le truc chouette ne résume pas le bonheur que l'on ressent. Le sentiment est une action en elle-même, un événement en lui-même, et je crois que Proust a été le premier sinon un des rares à aller dans ce sens. Plutôt que d'écrire quelque chose comme "aujourd'hui je suis triste car...", il s'est attaché à exprimer à quel point on peut être triste, émerveillé, heureux, quelles nuances de tristesse peuvent exister au coeur même de la joie et inversement, à quel point la manifestation du sentiment est compliquée, toujours inédite, en même temps rattachée à tant de souvenirs et de sensations diffuses, et donc impossible à décrire autrement qu'en prenant le temps de s'attarder dessus, plus que sur l'événement qui l'a motivé. Et dans cette expressivité du sentiment, Proust va si loin qu'il flirte avec la métaphysique, car tout sentiment, quel qu'il soit, nous ramène à ce qui fait de nous des êtres pensants doués de sensibilité, à l'humanité de manière plus universelle ; de là, je crois, on peut en arriver à cette conclusion étrange qu'il est plus un auteur d'idées qu'un auteur d'émotions. Mais ça me semble vraiment un contre-sens. La passion de Swann pour Odette dépasse de très loin la simple description scientifique d'un état malade, appuyée par quelques comparaisons heureuses : c'est toutes les nuances du désir, de la jalousie, de la possession, de l'envie, du tourment...

En fait Proust parfois me fait plus penser à un poète qu'à un romancier.

Publié : 07 Fév 2008, 20:21
par Beorn
eLiz a écrit :C'est assez surprenant comme constatation, car Proust est connu pour être l'auteur du sentiment, pour être celui qui est allé le plus loin en ce domaine - du moins, il me semble.


Mmh, ça ne me semble pas du tout contradictoire. Pour moi, il étudie, il décrit, il analyse le sentiment. Ce n'est pas pour ça qu'il provoque une émotion chez le lecteur.

Pour provoquer un peu, je dirai : c'est un chirurgien du sentiment, il le dissèque au scalpel. :-?

Je suis un peu comme Marina, pour moi, l'analyse des sentiments intimes est tellement poussée que cela en devient parfois dérangeant. Evidemment, c'est un ressenti personnel.

Re: Marcel Proust

Publié : 07 Fév 2008, 22:39
par Kran
Maerlyn a écrit :Car ce qui est le plus beau dans Proust, c'est son style.


Car ce qui est le plus lourd chez Proust, c'est son style.

Nan, j'ai faux? :oops:

Bon, O.K., il est considéré comme un génie, cela ne l'empêche pas d'être indigeste pour certains, et si cela vaut d'être un barbare, j'en suis. Je ne parle ni du fond ni de sa condition physique, etc. Il est alambiqué, complexe, sa phrase est sans fin et d'une structure unique, bien.

J'ai d'autres génies qui sont surement moins (re) connus, Lovecraft en était un, Poe, Maupassant, Shakespeare qui qu'il ait été, etc. On a parlé de Wikkie Collins ailleurs, un écrivain pourtant lent et minutieux, avec des intrigues qui s'étirent interminablement, comme parfois chez Dostoievsky (qui je croit n'est pas mauvais en "sentiments", ou Gao (qui à lu la montagne de l'âme? ), et l'Emploi du temps, de Butor, et les livres de Perec, etc, et les merveilles de Borges, et les chef-d'œuvre de Beckett?.

Laissons Proust sur son lit, avec ses interminables rouleaux de papier sur lesquels coulait sa thérapie. Je n'aime pas mettre qui que ce soit sur un piédestal (sauf Beckett, tient, pour la peine :P :P :P :P )

Re: Marcel Proust

Publié : 07 Fév 2008, 22:47
par Oph
Kran a écrit :et l'Emploi du temps, de Butor

Marrant, ça...
De Butor, j'ai lu Passage de Milan, L'Emploi du temps et La Modification.
Et L'Emploi du temps est le seul des trois qui m'a royalement fait chier, malgré l'audace de la construction temporelle.

Manque de pot, c'est celui-là que j'étudiais... :oops:

Re: Marcel Proust

Publié : 07 Fév 2008, 23:08
par Kran
Oph a écrit :Et L'Emploi du temps est le seul des trois qui m'a royalement fait chier, malgré l'audace de la construction temporelle.

Manque de pot, c'est celui-là que j'étudiais... :oops:


J'ai préféré La modification. :|
Ce n'était qu'un exemple qui m'est passé par la tête. :wink:

Re: Marcel Proust

Publié : 07 Fév 2008, 23:12
par Oph
Kran a écrit :
Oph a écrit :Et L'Emploi du temps est le seul des trois qui m'a royalement fait chier, malgré l'audace de la construction temporelle.

Manque de pot, c'est celui-là que j'étudiais... :oops:


J'ai préféré La modification. :|

Moi aussi, copain !

Publié : 08 Fév 2008, 10:36
par le_navire
J'ai lu Proust très jeune. Très très jeune, Beorn. Et je pense qu'à cet âge là, s'il n'y avait pas eu de sentiments dans ses textes, je n'aurais pas lu compulsivement toute la série, et avec une telle jouissance.
Proust n'est pas froid, et son détachement n'est que de surface : il met dans ses textes une distanciation qui me semble à moi exacerber au contraire les sentiments : je trouve Proust drôle, le plus souvent. Mélancolique, cynique, et drôle. Moins que Nabokov, peut être qui utilise le même procédé de distanciation pour décortiquer ses personnages, mais il y a une ironie constante dans sa prose qui déclenche chez moi des sentiments en cascade...

Publié : 08 Fév 2008, 11:30
par Beorn
Le Navire a écrit :J'ai lu Proust très jeune. Très très jeune, Beorn. Et je pense qu'à cet âge là, s'il n'y avait pas eu de sentiments dans ses textes, je n'aurais pas lu compulsivement toute la série, et avec une telle jouissance.


Oh, eh bien, je suppose que moi, je n'y ai pas été sensible. Chaque lecteur vibre à l'aune de sa propre histoire. (on a déjà eu ce débat là... :wink: )

La Navire a écrit :je trouve Proust drôle, le plus souvent. Mélancolique, cynique, et drôle. Moins que Nabokov, peut être qui utilise le même procédé de distanciation pour décortiquer ses personnages, mais il y a une ironie constante dans sa prose qui déclenche chez moi des sentiments en cascade...


Drôle et ironique, oui, certainement.
Mais Nabokov, ah Nabokov... :heart: Nabokov est drôle, cynique mais jamais froid. On rit devant Nabokov, mais on pleure aussi, on enrage. S'il existait une statue de Nabokov, j'irai lui baiser les pieds.

Publié : 08 Fév 2008, 12:34
par Nox
Beorn a écrit :Drôle et ironique, oui, certainement.
Mais Nabokov, ah Nabokov... :heart: Nabokov est drôle, cynique mais jamais froid. On rit devant Nabokov, mais on pleure aussi, on enrage. S'il existait une statue de Nabokov, j'irai lui baiser les pieds.


Je t'envoie donc à Montreux... où se situe la statue de Nabokov :lol:

Publié : 08 Fév 2008, 20:20
par eLiz
Oui, Nabokov, ça "déchire sa race" si je puis dire, évidemment.

Publié : 08 Fév 2008, 20:56
par Beorn
Nox a écrit :Je t'envoie donc à Montreux... où se situe la statue de Nabokov


:shock: :shock:
A Montreux en Suisse ?
Rooooo ! Faut que j'y aille !

Publié : 08 Fév 2008, 20:58
par Beorn
Ah et euh, eLiz, point trop déchirer sa race ne faut.
En toute chose, sachons raison garder. :roll:

Mais c'est vrai qu'il EXPLOSE TOUT le keum, un truc de ouf.
Ah ? La sortie ? Par ici dites-vous ? :arrow: